novembre 15, 2021

L’inflation, un sujet politique – Macroscope

L’inflation, tant qu’elle était faible au cours des dernières années, était surtout un sujet de politique monétaire, éventuellement de politique économique. Mais avec les records atteints récemment – 6,2% pour l’inflation annuelle aux Etats-Unis au mois d’octobre – elle devient un sujet brûlant de politique pure. Au point que Joe Biden déclare qu’elle devient sa « principale priorité », alors qu’il en parlait à peine jusqu’ici.

Si le sujet s’invite brusquement dans le débat, c’est surtout parce qu’il a longtemps été minoré dans le discours des autorités, et qu’il ne peut plus l’être. Ainsi la banque centrale américaine n’a-t-elle cessé de répéter depuis le début de l’année que l’inflation, prétendument transitoire, ne devait pas être source de préoccupation. Le marché l’a d'ailleurs suivie. Il n’a pas fait monter les anticipations d’inflation de long terme (swap d’inflation) au-delà de 2,7% cette année. Mais les données, qui à la différence des marchés ne craignent pas la Fed, pointent pourtant vers une inflation élevée assez durablement. Car une fois passé l’effet de base par rapport au confinement de 2020, et même si – par extraordinaire – les prix de l’énergie refluaient nettement après l’hiver et que les difficultés d’approvisionnement sur les chaînes de production se résorbaient rapidement, les dynamiques inflationnistes en place sur les salaires et sur l’immobilier aux Etats-Unis sont lancées, et leur inertie est forte. D’autant que la main d’œuvre est manquante.

La BCE est sur la même ligne. Ce n’est que lors de sa conférence de presse fin octobre que sa présidente a fini par reconnaître l’importance du sujet… pour finalement continuer à l’aborder comme un événement au sujet duquel rien ne devait être entrepris.

Mais les ménages ont fini par faire entendre leurs préoccupations. Aux États-Unis, les Républicains ont attaqué le plan d’infrastructures de Joe Biden – finalement adopté – sous l’angle de l’inflation induite sur les matières premières notamment. Ce qui a obligé le Président à contre-attaquer en présentant ce plan comme un modérateur d’inflation grâce à la fluidité accrue des transports de marchandises …Un argument peu convaincant, les difficultés de transport domestique n’étant guère la source de l’inflation actuelle. En Europe, le journal populaire allemand Bild caricaturait Christine Lagarde en  « Madame Inflation », insensible aux difficultés ressenties par les ménages modestes.

Le feu de l’inflation ayant pris à tous les étages, il faut y répondre énergiquement, enjoint Joe Biden. Mais que peut-il faire ? Premièrement, faire pression sur la Fed pour qu’elle durcisse les conditions monétaires. Mais ce n’est ni dans l’esprit des institutions (ce qui n’a pas empêché Trump de le faire en son temps, en sens inverse), ni efficace puisque la Fed est indépendante, ni dans l’intérêt de son plan de relance économique et d’endettement accru. Il pourrait aussi diminuer les taxes douanières imposées par Trump sur les importations chinoises. Mais ce serait un geste amical envers Pékin, qui n’est pas à l’agenda. Il pourrait diminuer son soutien aux bas salaires… mais ce serait se couper de son électorat à quelques mois des élections de mi-mandat. Enfin, il pourrait ralentir la transition énergétique du pays et soutenir la production de pétrole… ce qui irait contre son engagement écologique. Bref, il se retrouve acculé à des choix douloureux, sous peine de se retrouver coincé.

La BCE est tout autant embarrassée. L’institution s’est engagée à maintenir une attitude accommodante très longtemps, et doit soutenir à bout de bras la dette italienne, sous peine de fragilisation de l’euro.

L’inflation est donc là pour durer, et les autorités aussi bien politiques que monétaires sont dépourvues d’extincteur. L’inflation ne se laisse pas simplement contrôler, ni à la hausse ni à la baisse. Car l’économie n’est pas une simple mécanique. C’est plutôt un organisme doué de sa propre dynamique, sur lequel on n’agit pas d’un simple coup de tournevis monétaire. Un organisme politique au sens plein, et pas seulement un sujet de politique monétaire.

 

Rédaction achevée le 12.11.2021

Auteur : Alexis Bienvenu, Gérant


Telex

Hausse apparente, baisse réelle : Depuis l’après-crise de 2008, les salaires évoluent en hausse annuelle d’environ 2 à 3% aux Etats-Unis. Sur la dernière donnée, ils progressent de 4,9%. Pression inflationniste ? Certes. Gain de pouvoir d’achat ? Non. Car avec une inflation globale à 6,2% en octobre, l’évolution des salaires "réels" est nettement négative. Depuis avril 2021, les salaires hebdomadaires moyens réels sont passés en tendance négative. Les augmentations de salaires ne contrebalancent plus l’augmentation du coût de la vie. Au dernier pointage, alors qu’ils étaient en hausse entre 0 et 2% tendanciellement, ils baissent de 1,6%. On comprend que le moral des ménages baisse aussi : l’indice de l’Université du Michigan sur le moral des ménages pour novembre ressort à 66,8 contre 71,7 le mois dernier.

L’empire du Milieu contre-attaque : L’économie chinoise est sur le qui-vive en raison de la situation tendue de la construction immobilière. Cependant, malgré des rumeurs divergentes ces derniers jours, il semble confirmé, d’après Bloomberg, que le promoteur Evergrande, en quasi-faillite, ait payé ses dettes sur le mois. Evolution positive, tout comme celle du commerce. En octobre, la balance commerciale du pays se monte à 84 milliards dollars, un niveau inédit, en constante amélioration depuis mars 2021. Les exportations grimpent de 27,1 % sur un an, les importations de 20,6%. Des niveaux qui témoignent d’une économie en forme.



Picking de la semaine

INFINEON, un optimisme raisonnable.


L’actu. 

Le fabricant allemand de semi-conducteurs vient de publier un chiffre d’affaires trimestriel de 3,01 milliards d’euros, dépassant l’objectif fixé de 2,9 milliards. Les perspectives de croissance sont fortes, notamment grâce à la transition énergétique.


Notre analyse. 

INFINEON publie de très bons résultats pour le dernier trimestre de son année fiscale 2021, au-delà des attentes avec en particulier une forte amélioration de la marge. Les ventes sont en hausse de 21% tandis que la marge opérationnelle ressort 10% au-dessus des attentes. Les perspectives pour le prochain trimestre et l’année fiscale 2022 se révèlent également  supérieures aux attentes du marché. INFINEON continue à croître fortement en raison de deux thèmes, l’électrification et la digitalisation, auquel il est exposé au travers de ses produits. De plus, la transition énergétique est un moteur pour l’entreprise. Les cellules photovoltaïques sont en effet constituées en grande majorité de semi-conducteurs qui captent l’énergie du soleil et la transforment en électricité. L’explosion de la demande de projets solaires nécessaires pour atteindre la neutralité carbone est donc bénéfique à ses résultats. Lors de la conférence qui a suivi les résultats, le management s’est montré particulièrement optimiste, même si 2022 sera une année contrainte par le manque de capacité de production. Le prix de vente augmente dans les semiconducteurs de puissance sous l’effet de la forte demande structurelle. Un phénomène nouveau qui explique en partie la remontée des marges cette année.


En conclusion. 

L’entreprise munichoise reste optimiste. Fort d’une position de leader sur la plupart de ses marchés finaux, INFINEON poursuit ses gains de parts de marché et sa croissance. Son activité reste néanmoins cyclique et les problématiques actuelles de pénuries de composants amplifient ce caractère. Cela explique selon nous sa valorisation très raisonnable de 15 fois l’EBITDA 2022.

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Philippe Agnelli


Philippe Agnelli est titulaire d'un master II en gestion internationale de fortune. Passionné d'immobilier et de solutions financières il à fondé le cabinet de gestion de patrimoine Signatures Patrimoine. N'hésitez pas à le contacter.

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