Les assureurs ne sont pas toujours avisés du décès d’un assuré, soit parce que celui-ci n’avait pas d’héritiers directs, soit parce que ceux-ci n’avaient pas connaissance de l’existence du contrat, soit encore parce que les héritiers désignés au contrat n’ont pas pu être identifiés ou retrouvés par l’assureur. Cette masse de contrats non réglés constitue ce que l’on a coutume d’appeler les contrats d’assurance vie en déshérence.
Législation des contrats en déshérence
Le législateur a progressivement, au cours des 15 dernières années, durci les obligations imposées aux assureurs. A partir du constat du nombre de contrats en déshérence observé, le législateur a souhaité accompagner les bénéficiaires dans cette démarche avec l’aide des assureurs.
Plusieurs étapes successives ont vu le jour.
En 2005, les assureurs ont eu l’obligation de procéder à la recherche des bénéficiaires des contrats dont ils avaient connaissance au décès du souscripteur (loi du 15 décembre 2005 Agira 1).
Dans un deuxième temps, la loi s’est faite plus contraignante puisque le texte de la loi n° 2007-1775 du 17 décembre 2007 a imposé aux assureurs une “recherche active” des souscripteurs décédés et de leurs bénéficiaires. Ce texte visait notamment à obliger la profession à “s’informer du décès éventuel des titulaires de contrats”, mais sans en préciser le mode opératoire. Cela a nécessité une organisation de la part des assureurs afin de se conformer à la règlementation en vigueur.
Ces lois, ainsi que les deux arrêtés des 9 février 2006 et 23 avril 2007 complétant les dispositions des codes des assurances et de la mutualité, ont amené les organismes professionnels à donner mandat à l’AGIRA (Association pour la Gestion des Informations sur le Risque en Assurance) afin de centraliser les demandes de recherche et les adresser à l’ensemble des sociétés d’assurance, des institutions de prévoyance et des mutuelles.
Comment interroger l’AGIRA si vous pensez être bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie ?
La saisine de l’AGIRA est gratuite et simple. Il suffit d’adresser un courrier précisant les noms, prénoms, date de naissance du souscripteur présumé, accompagné impérativement de la copie de son bulletin de décès, ainsi que l’identité (nom, prénom et adresse) des bénéficiaires éventuels, à l’adresse suivante :
AGIRA (Recherche de bénéficiaires en cas de décès)
1, rue Jules Lefebvre – 75431 PARIS Cedex 09
A réception de votre courrier, l’AGIRA transmet votre demande à l’ensemble des assureurs adhérents qui ont 30 jours pour vous informer si vous êtes bénéfice d’un contrat souscrit chez eux, par le défunt. Passé ce délai et en l’absence de réponse, vous pouvez raisonnablement considérer ne pas être bénéficiaire d’un capital laissé par le défunt.
Loi “Eckert” du 13 juin 2014 – Les obligations des assureurs renforcées
Cette loi est venue renforcer très sensiblement les obligations des assureurs. En effet, depuis le 1er janvier 2016, ceux-ci doivent obligatoirement consulter au moins une fois par an le RNIPP, (Répertoire national d’identification des personnes physiques géré par l’INSEE). Cet outil permet de rapprocher le fichier des personnes décédées dans l’année avec leur portefeuille de contrats d’assurance vie ou de capitalisation, afin d’en identifier les souscripteurs décédés et d’en rechercher activement les bénéficiaires des contrats. La loi de 2007 le permettait déjà, mais celle-ci n’était que très peu appliquée par les assureurs. D’ailleurs, beaucoup d’assureurs ont écopé d’amendes très importantes sur ce sujet.
Dès lors qu’un décès est connu, l’assureur a une obligation de moyen afin de rechercher le ou les bénéficiaire(s) du contrat afin qu’ils puissent rapidement entrer en possession du capital. Au besoin, l’assureur pourra interroger l’administration fiscale pour obtenir les coordonnées des bénéficiaires (article L.166 E du Livre des Procédures Fiscales). L’assureur devra aussi consulter le notaire chargé de la succession du défunt.
Rappel
Les notaires ont accès au nouveau fichier FICOVIE qui recense depuis 2016 l’intégralité des contrats d’assurance-vie dont le capital est au moins égal à 7.500 euros. La loi du 13 juin 2014 a par ailleurs instauré d’autres contraintes aux assureurs afin de les inciter à plus de diligence.
Des mesures incitant à un transfert plus rapide des fonds
Désormais, l’assureur a un délai de 15 jours maximum, à partir de la réception par l’assureur de l’avis de décès du souscripteur, pour demander aux bénéficiaires la transmission des pièces nécessaires au règlement du contrat.
De plus, l’assureur a l’obligation de revaloriser le capital garanti au contrat dès le décès de l’assuré sur la base d’un taux minimum fixé annuellement par décret. Enfin, il existe un plafonnement des frais de gestion fixé par décret pendant toute la recherche des bénéficiaires.
Si les recherches de assureurs demeurent infructueuses concernant les bénéficiaires des contrats, le législateur a également prévu une démarche. En effet, le transfert automatique des fonds à la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) dans les 10 ans après la connaissance du décès par l’assureur est la suite logique de ces contrats en déshérence. Néanmoins, la récupération des fonds par le bénéficiaire est garantie pendant les 20 années suivantes. La CDC est en effet tenue d’en consigner l’origine sur un registre spécial et de publier l’identité des souscripteurs des contrats concernés. A l’issue des 30 années suivant le décès du souscripteur, les sommes non réclamées seront définitivement acquises à l’État.